Les sorcières débarquent sur la ville ? Starhawk, en tous cas, est là . Militante féministe, auteure, enseignante, formatrice, permaculturiste, celle qui se définit comme une « sorcière » est à Detroit, accompagnée de Lisa Fithian.
Toutes deux sont des figures de l’action directe non-violente. Elles ont mis leur détermination et leur créativité au service d’une multitude de luttes : mouvement anti-guerre (du Vietnam à la deuxième guerre d’Irak), syndicalisme, justice sociale, féminisme, anti-racisme, etc. Présentes à Seattle, Gènes, Porto Alegre ou encore Copenhague, elles ont également inspiré, directement ou indirectement, des formes de luttes comme Reclaim the  Streets, CIRCA (Clandestine Insurgent Rebel Clown Army, l’Armée des Clowns anglaise, dont le pendant français est la Brigade Activiste des Clowns).
Lisa (entretien à venir sur Mouvements.info) porte un regard enthousiaste sur ce forum, qui nous permet de ne pas oublier que le mouvement des Tea Parties n’est pas le seul mouvement social d’ampleur aux  USA, même si l’attrait des mass-medias pour ces mouvements réactionnaires occulte le dynamise des mouvements progressistes. Une vivacité à laquelle les sorcières venues à Detroit ne sont pas complètement étrangères !
Photo : Jean-Paul Duarte
Cher Nicolas,
Opposer les « progressistes » aux « réactionnaires » et en la matière « l’armée des clowns » au « Tea Party » c’est un peu opposer les classes moyennes aux classes populaires et revendiquer de façon (un peu) intéressée la suprématie du capital culturel – et à notre époque donc du capital tout court – sur le travail (et en l’occurrence également un groupuscule éclairé à un mouvement potentiellement de masse) : or les Tea Party ont peu de chance de devenir des bobos ou de parvenir au pouvoir, à la différence des clowns. Comme Chomsky (dont on n’a pas besoin en France) l’a dit à Paris : ces gens ont des griefs, réels, il faut les entendre (malgré la forme désagréable que cela prend pour les gens biens éduqués.) D’autant plus que si les Tea Party ont peu de chance d’arriver au pouvoir, ils peuvent par contre porter des démagogues au pouvoir d’autant plus que la « gauche » les méprise ouvertement (c’est la formule qui a assuré le développement durable des conservateurs aux EU comme l’a montré Thomas Frank dans What’s the matter with Kansas.) Or une partie des libéraux qui ont mené des politiques radicalement anti-labour dont l’exemple est Clinton étant issus de la nouvelle gauche mouvementiste de campus des années soixante, un tout petit peu de réflexivité ne serait pas de trop, une génération plus tard, en lieu et place des grands récits héroïques, si on ne veut pas fournir au capitalisme ce qu’il désire par-dessus tout : une classe moyenne (alter)-mondialisée belle comme une pub pour Benetton de la domination des travailleurs et des pauvres, c’est à dire du profit.
Bien à toi
BendyGlu
Peintre du Champ à Argein
erratum : dernière phrase, lire si on ne veut pas fournir au capitalisme ce qu’il désire par-dessus tout : une classe moyenne (alter)-mondialisée belle comme une pub pour Benetton au service de la domination des travailleurs et des pauvres, c’est à dire du profit.
salut Bendy,
Merci de ton commentaire. C’est pour parti dû à la manière trop rapide dont mon post était rédigé : quand elle évoquait la vivacité de la gauche, invisible médiatiquement par rapport au mouvement des Tea Parties, Lisa Fithian ne parlait pas des clowns, mais des expériences « communautaires », notamment à Detroit. Je ne connais pas bien les USA (c’est la première fois que j’y suis), mais Detroit n’est pas San Francisco – et le USSF lui-même n’est pas à l’image de San Francisco. Les organisateurs ont même refusé de l’organiser là -bas, craignant qu’il ne soit qu’un forum « white colored upper-middle class ».
Cette rencontre avec Lisa s’est d’ailleurs faite durant une manif contre un incinérateur (cf. post précédent de Jean-Paul) – Lisa était enthousiaste de voir que cette manif était d’abord une manif des habitants des quartiers concernés – d’où les propos relatés en fin de cet article. S’il transparait une opposition Tea Parties-Clowns elle n’est pas de Lisa, mais du rédacteur (en partie parce que j’ai rédigé ça rapidement, mais sans doute par déformation sociale/militante…, ton rappel m’est donc utile).
Je ne crois pas qu’il y ait là matière à opposer bobos et classes populaires, bien au contraire : autant rappeler qu’existent des mouvements populaires progressistes – souvent ouvertement anti-capitalistes (ça tranche donc un peu avec l’analyse de T. Frank qui situe le clivage sur les valeurs, ici, le clivage se joue autour d’un mélange « racial » et de classe).
On peut en rediscuter à Marseille si tu es dans le coin ces prochains jours!
Nicolas